Le mois dernier, j’ai participé à un séminaire économique à Orléans, au cours duquel un intervenant a fait un discours très intéressant sur l’équilibrage du marché. Une question qui, pour simple qu’elle puisse paraître, est en fait particulièrement complexe, et à l’origine de nombreuses dissenssions entre économistes.
Un marché est en équilibre lorsque la quantité que les vendeurs souhaitent offrir est égale à la quantite que les acheteurs souhaitent demander. La question la plus importante de la macroéconomie reste celle de savoir si les marchés s’équilibrent et, s’ils le font, à quelle vitesse. A l’un des extrêmes, il y a l’analyse classique qui suppose que tous les marchés s’équilibrent. L’économie se trouve alors au niveau du plein emploi et du produit potentiel. Dans ces conditions, une politique monétaire expansionniste augmentera les prix et non le produit, et une politique budgétaire expansionniste évincera une dépense privée de consommation et d’investissement, jusqu’à ce que la demande globale retrouve son niveau de plein emploi. A l’autre extrême, l’analyse keynésienne suppose que les marchés, notamment le marché du travail, ne s’équilibrent pas. Quand la flexibilité des salaires est imparfaite, une diminution de la demande globale de biens et de la demande de travail débouche sur une réduction du produit et de l’emploi. Dans une telle situation, une politique budgétaire et monétaire expansionniste pourra accroître le produit réel.
Alors, les marchés s’équilibrent-ils ou non ? Comme le rappelait cet intervenant, il est intéressant de constater que la charge de la preuve s’est déplacée avec le temps. Avant, la plupart des économistes tenaient pour acquis l’équilibrage des marchés et s’efforçaient d’expliquer les périodes où le chômage était élevé dans ce cadre d’analyse. Dans l’immédiat après-guerre, la plupart des économistes considéraient ainsi toujours que les marchés ne s’équilibraient pas nécessairement à tout instant et cherchaient à interpréter la macroéconomie dans le cadre du paradigme keynésien.
Dans les années soixante et surtout dans les années soixante-dix, le pendule s’est à nouveau inversé. De nombreux économistes soutenaient que, si la viscosité des salaires entraîne un chômage involontaire, les travailleurs trouveront sûrement un moyen de rendre les salaires plus flexibles et d’éviter ainsi le coût d’un chômage involontaire. Il est alors devenu à la mode de dire que l’hypothèse keynésienne de la viscosité des salaires ne repose sur aucun fondement microéconomique plausible. Dans les années quatre-vingt, le pendule semble bien avoir oscillé à nouveau dans l’autre sens. Les économistes keynésiens ont commencé à articuler des fondements microéconomiques sous-tendant la viscosité des salaires, et moins d’économistes ont cru à l’hypothèse d’un équilibrage automatique des marchés.
Au final, il revient donc aux historiens de la pensée économique de décider si les changements d’humeur des économistes reflètent toute l’élégance de soubassements théoriques… ou l’hypothèse beaucoup plus grossière selon laquelle l’opinion qui insiste sur l’équilibrage des marchés devient moins plausible quand le chômage recensé devient très important.
Cette question est en tout cas très sérieuse, car les différences d’opinion, quant à la vitesse avec laquelle les marchés s’équilibrent, sont au cœur des positions divergentes qu’adoptent les grandes écoles macroéconomiques modernes.
Plus prosaïquement, ce séminaire m’a permis de découvrir la ville, que je ne connaissais pas vraiment. C’est un très bel endroit, et si vous n’y êtes jamais allé, je vous recommande le voyage. L’agence qui a organisé ce séminaire nous a concocté un programme aux petits oignons qui nous a permis, et j’ai beaucoup apprécié la découverte. Suivez le lien pour toute information sur ce séminaire incentive à Orléans.